vendredi 31 octobre 2008

For geeks only

L'alphabet geek

(y'a que des choses utiles, sur Le bibwebzine)



lundi 27 octobre 2008

Classer la francophonie

Un article de Chantal De Grandpré publié dans le dernier numéro de "Bibliothèque(s)", la revue de l'Association des Bibliothécaires de France (non disponible en ligne - bravo l'ABF 1.0) me semble contestable à bien des égards. Il s'intitule "La Bibliothèque francophone multimédia de Limoges : ou la francophonie au coeur même de la France profonde", titre sur lequel je ne ferai pas de commentaire, sinon sous une forme interrogative : d'où parles-tu ?

Je voudrais juste évoquer ici une question de taxinomie : "Qu'est-ce qu'un auteur francophone ?" s'interroge CDG. Je sais, cette question est casse-gueule - mais peut-être est-elle seulement mal posée... La réponse, très borgésienne et qu'il est préférable d'aborder sous un angle ironique, prend la forme d'une liste qui va du plus simple ("les cas qui ne posent aucune interrogation métaphysique au bibliothécaire catalogueur") au plus complexifié. Je cite (c'est moi qui souligne) :

"les états de la francophonie solaire que sont le Québec, la Belgique et la Suisse"

"les auteurs dits "du champ" - entendre : issus des ex-colonies françaises - principalement du Maghreb et de l'Afrique noire"

"Reste l'épineuse question des expatriés linguistiques : Agota Kristof, d'origine hongroise ; Andreï Makine, russe ; Hector Bianciotti, argentin ; Eugène Ionesco, roumain,..."

"Et celle, pire encore, des bilingues ou multilingues transculturels rétifs à toute classification : Samuel Beckett, dont l'oeuvre majeur est écrit en français mais qui revient à l'anglais à la fin de sa vie ; Vladimir Nabokov, dont le Lolita est un des chefs-d'oeuvre de la littérature américaine mais qui a commis quelques textes en français ; Nancy Huston, canadienne mais pas canadienne-française, plutôt canadienne et française, qui s'auto-traduit."

Savoureux. Goûteux. Il y manque, à mon avis et toujours dans une optique borgésienne, une rubrique :

ceux qui n'entrent dans aucune de ces catégories : auteurs du Proche et du Moyen-Orient, d'Asie, des Caraïbes (par exemple) qui utilisent le français comme langue d'écriture.

On notera que CDG distingue bien une francophonie de pays riches (le francophonie "solaire") d'une francophonie de pays moins riches (les auteurs dits "du champ"). Sans commentaire, tellement c'est affligeant.

CDG dit souvent, à qui veut l'entendre, que lorsqu'elle est arrivée en France elle s'est réjouie à l'idée d'habiter désormais dans un pays monolingue - les catalans, occitans, bretons, basques, et autres militants de la reconnaissance des "autres" langues parlées en France apprécieront. Quant à moi, je ne partage pas sa conception étriquée de ce qu'est ou devrait être la francophonie et la manière dont elle pourrait vivre dans les bibliothèques françaises, y compris et surtout à la Bibliothèque francophone multimédia de Limoges.

Djibril Diop Mambety, réalisateur camerounais dont il faut absolument voir et revoir Hyènes, récemment sorti en DVD, affirme : "Le français, nous l'avons payé cher ; maintenant, il nous appartient". J'approuve.

jeudi 23 octobre 2008

Cassette audio

Une dame d'un certain âge qui entre dans la section littérature :

- Bonjour Monsieur, j'avais fait demandé, y'a un moment déjà, une cassette audio.
-Une cassette audio... [on fait encore ça nous?]. Vous voulez dire un CD? Parce que ici vous êtes à la section littérature...
-Non, non, une cassette audio, vous savez...
- [euh non pas trop là...]. Oui bien sûr!...euh, vous voulez dire un livre enregistré?
-Oui c'est ça. On devait me le faire venir de la grande bibliothèque...
-[la centrale]...
-...votre collègue l'a écrit.
-...[mon collègue a envoyé un message par lotus pour demander d'acheminer le document dans notre annexe]...

Après moult recherche,
- ben non madame, désolé, mais je n'ai rien à votre nom dans nos réservations ou dans les demandes...Quel est le titre de votre cassette?
-A bout de souffle
-Mais c'est un film ça...
-ben oui...je vous ai dit que c'était une cassette audio!
-[aïe!]. Dans ce cas-là madame il faut que vous alliez à la vidéothèque qui est de l'autre coté de la bibliothèque, là où vous aviez fait votre réservation.
-Ah bon. Merci monsieur.
-Je vous en prie madame. [oufff!]

L'art de lire ou comment résister à l'adversité

Journée "Le goût des mots" organisée par le CRL Limousin. Quelques notes très rapides, prises lors la conférence de Michèle Petit (en attendant de lire son livre) :

- Rôle de la lecture dans la reconstruction de soi
- Importance d'une intersubjectivité gratifiante
- Lecture comme métaphore où le corps est touché
- Tout commence par des rencontres, par un accueil, une hospitalité
- Désanesthésier la créativité
- Importance de participer à quelque chose de plus grand que soi
- "On est reconnu, on a une place, on est chez soi" (enfants et ados en bibliothèque)
- Oralité au coeur des programmes développés dans les endroits en crise. Importance du corps et de la voix du médiateur
- "Espaces transitionnels" (cf. Winnicott)
- Importance des rapports "gratuits", ludiques
- Etre humain = maison intérieure en perpétuelle rénovation (prédisposition à la crise)
- Prédisposition au récit (cf. Brunner, Propp), particulièrement en situation de crise
- Mais le médiateur de la culture ne peut pas se substituer à un professionnel du psychisme
- Importance du rythme, de la musicalité du texte
- Espaces de "lectures librement partagées"
- Projets "politiques" autour de la litttérature = redéploiement des possibles
- Accompagnement bienveillant et discret
- Quelles oeuvres aident à vivre en situation de crise ??? Tout matériau peut faire l'affaire ; importance de l'inattendu ; l'essentiel passe d'inconscient à inconscient ; importance de la poésie ; effet narcissisant des textes exigeants ; lecture de polars comme stratégie de résistance à la destruction
- Les textes-miroirs collant à l'expérience sont de peu d'intérêt : rejet du réalisme
- Chercher plutôt des textes métaphoriques
- Importance du décalage pour être étonné ; force du détour par l'éloignement temporel ou géographique.

Michèle Petit est anthropologue au LADYSS (CNRS, université Paris 1). Elle mène des recherches sur la lecture, particulièrement dans des milieux éloignés de la culture écrite et privilégie l'analyse de l'expérience singulière de ceux qu'elle rencontre.

Dernier livre paru
L'art de lire : ou comment résister à l'adversité (Belin, 2008)

mardi 21 octobre 2008

Google readée

J'utilise Google reader depuis quelques semaines et je suis assez séduite par cet outil de veille, même s'il pourrait encore être amélioré.

Il est très facile à utiliser, vraiment à la portée de tous.

L'interface publique est agréable d'aspect et facilite la lecture.

Il permet de partager ses trouvailles et de les mettre à disposition par mail, sur son blog, sur Facebook, sur Friendfeed,... (cf. ma liste de partage, ici-même en haut à gauche de l'écran) ;

On peut aussi partager sa liste de partage avec d'autres "partageux" ce qui, si l'on pense veille collective au-delà des murs de nos bibliothèques, me semble riche d'énormes possibilités. Pourquoi ne pas organiser, entre bibliothécaires, un "Biblio links" sur le modèle de ce qu'ont fait des journalistes avec Média links ? Cela me semble réalisable, là, presque tout de suite et sans gros effort, puisque chaque participant veillerait sur les domaines qui l'intéressent. Une biblioblogothèque sans frontières mise à jour quotidiennement... Moi, je marcherais à fond dans ce genre de projet, alors s'il y a des volontaires, on y va !


Quelques critiques tout de même - Google Reader n'est pas parfait.

Le nuage de tags, si utile pour la recherche, n'est visible que sur la page de stats et uniquement par le "propriétaire" de l'agrégateur.

Les lecteurs ne peuvent pas laisser de commentaires : dommage !

Les textes proposés à la lecture apparaissent pour la plupart en lecture intégrale : visites perdues pour les blogueurs ?

lundi 20 octobre 2008

Sélect


Gros coup de coeur pour La sélec, un tout nouveau magazine édité par la Médiathèque de la Communauté Française de Belgique, découvert grâce à Médiamus.

lundi 6 octobre 2008

20/20

M. a 11 ans. Il est en 6ème dans un des deux collèges du quartier et vient très souvent à la bibliothèque. Il était puni, privé de cyberbase jusqu'à samedi dernier pour non respect des règles. Privé d'internet, de jeux, de clips de rap, de chat avec les potes - on ne va quand même pas se laisser enquiquiner par des enfants de moins de 12 ans, n'est-ce pas ? Et samedi, à l'ouverture, il était là, avec un visage sérieux et pas du tout escroc de banquier quinquagénaire qui s'attend à recevoir des prébendes de l'Etat. Un dossier rouge à la main, bien en évidence, pour le cas où nous n'aurions pas compris tout de suite qu'il n'était pas là pour rigoler.
"Il faut que j'aille à la cyberbase, j'ai un exposé à faire pour lundi.
- Je te rappelle que tu es puni, M.
- Oui, mais c'était jusqu'au 4 octobre et le 4 octobre c'est aujourd'hui.
- C'était jusqu'au 4 octobre INCLUS.
- Madame, il faut que je fasse mon exposé ! C'est pour lundi !
Ben voyons ! Et si ton travail n'est pas fait, ce sera la faute des bibliothécaires, si je comprends bien ?
- Qu'est-ce que c'est, ton exposé ?
- C'est sur Wolfgang Amadeus Mozart.
Pour un peu, il prononcerait à l'autrichienne. Visiblement, il s'est bien entraîné avant de venir. Regard franc, direct, presque passionné, d'érudit septuagénaire qui voudrait consulter un document rare. Non, il en fait un peu trop, là !
Bon, s'il est vraiment si motivé pour bosser sur Mozart, nous ne pouvons pas décemment l'en empêcher. Bien joué, M. !
Il a donc, en vrai, consacré son heure d'internet à préparer un exposé très complet sur le grand compositeur, avec l'aide de l'un des animateurs. Aux 20/20 en musique, j'ajouterais bien un 20/20 en négociation efficace...

samedi 4 octobre 2008

Réseaux sociaux

Découvert sur l'excellent Geek & poke


vendredi 3 octobre 2008

RMI

Un jeune couple. Elle sauvagement belle, lui un peu ours. Ils viennent pour la première fois à la bibliothèque, ne savent ni lire ni écrire. Je remplis leurs fiches d'inscription à partir de leurs "permis de circulation" et leur demande de faire eux-même la croix pour signer. Je leur explique comment fonctionne la bibliothèque, les possibilités qu'offre le réseau, les règles de prêt, à quel endroit ils peuvent trouver tel ou tel type de documents. Ils semblent inquiets en me regardant remplir leurs fiches sur l'ordinateur. "Vous n'allez pas nous supprimer le RMI ?" dit l'homme. Je camoufle mon étonnement comme je peux, les rassure, explique encore.

Ils filent à l'espace DVD et empruntent un film de Jean Renoir, après s'être assurés qu'il est bien en version française - choisir la langue avant de lancer un film lorsqu'on ne sait pas lire, la difficulté est trop grande !

Depuis ce jour-là, ils sont revenus tous les jours, toujours ensemble, ils ont feuilleté des mangas, emprunté des DVD pour enfants. Ils parlent peu mais semblent se sentir bien ici.