mardi 30 septembre 2008

Entre les murs

Pour être honnête, je n'étais pas très chaude pour aller voir le film de Laurent Cantet (Palme d'Or à Cannes 2008, est-il utile de le rappeler aux étourdis qui ne suivent pas l'actualité ?). Et pourtant, comme pour L'esquive d'Abdelatif Kechiche, je dois reconnaître que j'ai totalement adhéré et que je ne m'y suis pas ennuyée une minute. J'ai trouvé ce film subtil, pas du tout manichéen, pas donneur de leçons, et je ne suis finalement pas surprise que le jury l'ait choisi à l'unanimité. Je l'ai regardé en bibliothécaire de banlieue qui accueille des adolescents ; la situation est différente, puisqu'ils viennent à la bibli librement alors qu'ils sont contraints d'aller à l'école, mais je me suis à plusieurs reprises identifiée à ce prof de français confronté à des réactions, à des paroles, à des comportements imprévus. Plusieurs fois, j'ai eu envie de lui dire "non, fais gaffe, c'est pas comme ça qu'il faut faire, ça va être la cata si tu entres dans le jeu !"

Le personnage que j'ai préféré, c'est Esmeralda, la tête à claque qui refuse de lire le Journal d'Anne Franck, qui se livre à des considérations sociolinguistiques sur le plus-que-parfait du subjonctif, fout la merde pendant le conseil de classe, a des attitudes systématiquement négatives... mais dont on apprend à la fin de l'année qu'elle a avalé un livre de sa grande soeur, La république de Platon. Rien que ça ! Là, la tête du prof vaut 20 ! Et on en déduit que l'école n'a peut-être pas nourri convenablement son intellect durant toute cette année. En bibliothécaire, je me dis qu'il y a peut-être là une idée à creuser : les adolescents sont des gens sérieux, qui se posent des questions sérieuses, notre rôle d'adultes référents est important pour les aider dans ces cheminements. Si l'Education Nationale ne le fait pas, pourquoi pas les bibliothèques ?

Le personnage le plus caricatural, à mon avis, c'est le proviseur, avec son physique et sa tête de personnage de manga aux yeux démesurément agrandis et aux discours stéréotypés.

Le détail qui m'a le plus choquée, c'est le conseil de discipline qui se déroule... au CDI. Cela semble avoir échappé à la plupart des commentateurs, mais pour moi c'est lourd de sens.

La situation qui me semble la plus inacceptable, c'est le déroulement du conseil de classe, où visiblement les deux déléguées ne sont pas prises au sérieux, au point qu'on les laisse pouffer, se parler à voix basse, se lever - sans remarquer au passage qu'elles notent tout ce qui se dit pour le rapporter à leurs camarades. Le proviseur leur fait juste remarquer qu'elles ne doivent pas manger de gateaux, mais à aucun moment il ne leur rappelle en quoi consiste leur travail de déléguées et quel est le comportement adéquat en conseil.

Voilà, c'étaient juste quelques remarques rapides avant une réunion qui va commencer. Ce post n'est pas du tout à lire comme une analyse critique du film - on pourra en trouver à plein d'autres endroits. Ce qui est sûr, c'est que ce film mérite d'être vu, quelles que soient les prévenances que l'on peut avoir a priori.

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