mardi 13 mai 2008

Marie-Antoinette

Je suis en train de lire avec beaucoup de plaisir Pandore au Congo d'Albert Sanchez Piñol (Actes Sud, 2007), traduit du catalan par Marianne Millon. Ce romancier a vraiment l'art du portrait ; qu'on en juge avec l'extrait suivant :

"Une tortue sans carapace est une chose extrêmement rare. A bien y réfléchir, les tortues sont déjà en soi d'étranges créatures, avec leurs petites pattes d'éléphant en miniature, leur bec de perroquet et leur queue conique. Et Marie-Antoinette, de surcroît, n'avait pas de carapace. C'était angoissant de la voir, plus mince qu'une saucisse, sa peau de reptile tendue autour de son corps. Elle ne pouvait cacher la tête nulle part et, dans une réaction hautaine, elle la tenait toujours dressée comme un périscope, défiant les humains d'avoir le courage de critiquer sa monstruosité ambulante. Parce que Marie-Antoinette ne se tenait jamais tranquille, et quand elle se déplaçait on aurait dit un nageur épileptique. Il était impossible de s'habituer à une tortue qui courait comme un scarabée, libre du lest que supposait la carapace. Soudain, on apercevait une ombre farouche, accrochée aux murs et tournant au coin. Marie-Antoinette détestait tous ceux qui la regardaient d'un air étonné."

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